• Le Conseil municipal de la Ville de Genève a exercé son droit de préemption sur une parcelle de 1500 m2 au Petit-Saconnex. Le droit de préemption permet à l’Etat ou à une commune de se substituer au vendeur et, dans les zones dites de développement, d’imposer un prix s’il est jugé spéculatif, ce qui peut équivaloir à une expropriation. Cette affaire soulève des questions sur l’immixtion de l’Etat et la garantie de la propriété.
  • L’article 26 de la constitution fédérale garantit la propriété comme une liberté fondamentale et prévoit, en cas d’expropriation, un droit à une pleine indemnité. Cette garantie implique le libre choix pour le propriétaire de vendre son bien au prix souhaité. Cependant, l’Etat peut restreindre cette liberté si un intérêt public le justifie, comme la construction de logements sociaux (Loi sur le logement et la protection du locataire, LGL), la protection du patrimoine (Loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites, LPMNS), ou l’installation d’entreprises à coûts réduits (Loi sur les zones de développement industriel ou d’activités mixtes, LZIAM).

  • Juridiquement, la préemption de l’Etat ou de la commune peut s’exercer sur un bien-fonds, qu’il s’agisse d’un terrain, d’une villa ou d’un immeuble de rendement déjà construit. Cet acte, hautement politique, est toujours exercé par des élus du peuple (conseillers d’Etat, conseillers administratifs, maire ou conseillers municipaux), ce qui peut donner lieu à des tensions.
  • Sun Tzu, dans l’art de la guerre, a écrit : « Si vous vous connaissez et connaissez votre ennemi, vous remporterez la victoire dans cent combats sur cent. Si vous vous connaissez, mais ne connaissez pas votre ennemi, vous vaincrez une fois sur deux. Si vous ignorez tout de vous-même, ainsi que de votre ennemi, vous n’êtes jamais victorieux. »
  • Pour éviter une préemption, un propriétaire doit identifier l’intérêt public et la stratégie de l’Etat. Concernant la politique de logement, il doit se demander si son bien peut encore être développé. Pour un terrain, vaut-il mieux construire lui-même des logements sociaux ou laisser l’Etat le faire ? Pour un immeuble de rendement, une surélévation est-elle envisageable ? Le choix de l’acheteur répond-il à un intérêt public ?
  • De son côté, l’Etat doit considérer le profil du propriétaire avant d’engager l’exercice du droit de préemption. Cela concerne notamment les propriétaires de villas destinées à être détruites pour développer des terrains. Leur logement représente souvent leur foyer et leur principal patrimoine. Par exemple, un couple proche de la retraite qui doit vendre sa maison pourrait percevoir une préemption avec réduction du prix comme une injustice.
  • À Genève, où se déroule une des plus grandes mutations urbaines d’Europe, les entreprises industrielles quittent les quartiers de la Praille, des Acacias et des Vernets (PAV) pour des zones aujourd’hui résidentielles. Ces quartiers, souvent proches de l’aéroport et situés dans des zones bruyantes, sont occupés par des familles ayant dû renoncer à des quartiers plus cossus. Ces familles se voient parfois courtisées par de grands groupes industriels, ce qui peut être perçu comme une menace par l’Etat si ses objectifs divergent.
  • Un examen attentif des populations concernées et de leurs aspirations est nécessaire pour éviter des crises politiques majeures et protéger le travail d’une vie. Quant aux propriétaires, ils doivent anticiper et identifier les leviers leur permettant de préserver leur patrimoine.